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Moi trentenaire++ et l'ivrit

Dernière mise à jour : 19 sept. 2019

Oui bien sûr, beaucoup de français parlent l'hébreu couramment...et même parfois sans accent frenchy. Kol Acavod (bravo) !


Sinon, il y a les autres :

- ceux qui refusent de s'y mettre catégoriquement (blocage psychologique, flemme totale, oh non non non suis trop vieux pour ça..) et qui vivent en anglais en espérant qu'ils ne tomberont pas sur un religieux ou une israélienne d'origine russe qui ne connaît pas un mot, mais alors pas un seul mot d'anglais ;

- ou encore ceux qui essayent mais qui n'y arrivent qu'à moitié. Car apprendre l'hébreu au-delà de l'âge de 30 ans, ça peut devenir un vrai parcours du combattant.


Pour ma part, je me range du côté de ceux qui font un demi-effort d'intégration. Faire son alyah avec pour seul bagage sémantique (Shalom, ken , lo, et sliha) peut relever de la folie pure. Bon, je n'allais pas me décourager pour si peu. Mes convictions sionistes l'emportaient sur la difficulté que représentait l'alyah.

Et puis, on nous bassinait la tête avec l'idée (complètement fausse) que nos enfants s'intégreraient en 3 mois maxi (mais oui bien sûr) et qu'avec eux, nous deviendrions bilingues en un temps record. Nous n'étions certes pas dupes de la supercherie marketing de l'agence juive, mais rien ne pouvait nous arrêter. Nous devions partir. C'était sans nulle doute la grande "mission" de notre vie.

Ok Ok. Je vous passe le départ, l'arrivée etc ... on en parlera une autres fois.


Me voilà enfin sur les bancs de l'oulpan après 7 mois d'alyah (bha oui, avant je n'avais pas de place au mahon (crèche) de la ville pour mon 2e enfant). Alors pour le chapitre oulpan, je n'ai quasiment que des éloges à faire. J'ai tout appris, forcément je ne savais rien. J'ai rencontré pleins de gens super, forcément ils vivaient la même expérience délirante que moi. Ca m'a rappelé un peu l'école. Ca m'a beaucoup saoulée aussi parfois, je ne saurais mentir, mais finalement, je savais aligner 3 phrases correctes à la suite en mélangeant, tenez-vous bien, le présent, le passé et le futur. Grandiose ! Oui je me satisfais de peu. Voilà j'arrive enfin à communiquer avec la ganenette de ma fille d'origine russe, donc vous le savez maintenant, qui ne connaît pas un mot, mais alors pas un seul mot d'anglais.


Seulement voilà, l'oulpan s'arrête. Il faut travailler maintenant, trouver sa parnassa et sa place dans la société israélienne. Alors, on pratique autant que l'on peut, pour faire ses courses, dans les mishads (les bureaux, banques etc...), aux gan et beit séfer (écoles) des enfants, avec le serveur de café avec lequel on tente une discussion qui relève du débile profond. Oui, ne pas parler la langue du pays peut quelque-fois vous renvoyer une image assez désagréable de vous-même. Mais passons. Faire son alyah, c'est d'abord faire preuve d'humilité sachez-le !


Donc tout ce préambule un peu pompeux mais nécessaire pour vous annoncer, que nous autres franco-israéliens, un peu flemmards mais pas trop quand même, avons créé une nouvelle langue : le "franbreu" avec des touches de "franglais", histoire d'être sûrs d'avoir été compris. Vous commencez à deviner, n'est-ce-pas ?


Au bout de 4 ans d'ayah, vous êtes déjà passés sous le bulldozer de la vie israélienne. Vos habitudes ont littéralement changé, votre langage est métamorphosé. Parce que même entre français, on ne parle plus exactement la langue de Molière. Tous les mots hébreux de votre quotidien ont été assimilés et imprimés dans votre cerveau à tel point qu'il nous arrive de chercher le mot en français. C'est étonnant vous trouvez pas ?


Donc, dans une discussion absolument banale, l'ivrit s'est invité avec panache, ce qui pourrait donner "stam" (genre) : Hamuda, on va se prendre un café afour béyahad (café allongé ensemble).

ou encore : ce resto est ioter midai (mieux)

ou encore : je suis partie à la hanout (magasin) de .... la rechbon (l'addition) était salée.

Vous croyez vraiment qu'on utilise encore ce mot, "l'addition" ?????? Rien que de l'écrire, j'ai l'impression de le redécouvrir comme une enfant qui s'étonne de tout (ce qui ne fera pas de moi une philosophe pour autant).


Mais la vie ne se résume pas à nos relations entre franco-israéliens. Il nous arrive quand même de nous frotter aux israéliens. Et là, ça peut devenir comique, voire même embarrassant.


On commence à parler, on arrive toujours plus ou moins à formuler une demande, à traduire le fond de notre pensée. Seulement, le problème est que la personne en face de vous va vous répondre.... et OUI, parfois je m'arrêterais bien sur mon exploit de jour, mais non, il faut maintenant ECOUTER avec ATTENTION chaque mot qui va sortir de sa bouche, priant pour que son accent ne prenne pas le dessus. Lui, il s'en fout que tu sois ola hadasha (nouvele immigrante) ou ce que tu veux d'autres, il va te parler comme il parle à n'importe qui. En même temps, je suis touchée par son égard à ne ne pas me faire passer pour une débilos de service, enfin au début ...


Donc voilà, j'écoute .... et dans ma tête c'est toujours la panique à bord, vas-y mél écoute, essaye de comprendre .... non mais là suis perdue ... au secours, j'en peux plus... ah ah ah, j'ai pigé un mot là vas-y vas-y rebondis dessus direct !!

Sauf qu'il repart de plus belle ... et c'est rebeulot. De l'extérieur, on pourrait penser que la meuf maîtrise, waou respect !! Mais moi, je sors de là rincée comme si j'avais été mise KO sur un ring de boxe. Et je vous assure que cette pitoyable métaphore n'est pas disproportionnée.


Il arrive toutefois que je sois obligée de comprendre ce que mon interlocuteur me dit. Alors au moindre passage peu clair, je dois faire preuve d'autorité en lui coupant la parole avec vigueur (oui on n'arrête pas un israélien de parler si facilement... bha oui la plupart parlent forts, voire peuvent donner l'impression de s'engueuler (genre rixe verbale de ouf), mais non non non, c'est ni plus ni moins leur façon de s'exprimer... et vous me croirez ou pas, je commence à parler l'hébreu avec véhémence aussi... ce qui est sans doute bon signe !!)


Quand je coupe la parole maintenant, je ne m'excuse plus (bravo mél), j'apostrophe direct mon interlocuteur avec un "lo éventi cloum, arshav ata iérol lédaber leat leat bevakasha" : en avant la traduction "je n'ai rien compris, tu pourrais parler plus doucement please ?

Ou encore : "mazé" ... (qu'est-ce-que c'est, pour dire, qu'est-que ça veut dire ce mot ????? )

Ou encore plus gênant : "er omrim" trouver, find ? (comment on dit trouver, find en anglais )

Et là, s'il ne comprend pas, je dois avoir recours à mon arme ultime, le langage des mains. C'est à ce moment-là que je sais que j'ai touché le fond et que je dois apprendre l'hébreu la nuit s'il le faut...sauf que j'ai toujours autres chose de mieux à faire ... Pas vous ?


Alors je remercie, ma prof d'oulpan sans qui je n'aurais même pas pu atteindre les balbutiements de la conversation; je remercie mon mari pour son soutien sans faille (lui: comment tu dis ça... waou mais tu parles vraiment bien ...moi: oui ok merci chéri); je remercie mes enfants qui refusent de parler hébreu à la maison parce que maman est trop nulle, mais qui m'offrent chaque jour l'occasion de me perfectionner avec les mots des morots (maîtresses) et les énoncés des devoirs etc... Je fais une dédicace spéciale pour la beit séfer (école primaire) de mon fils qui me donne entre 2h et 3h de devoirs à faire à la maison chaque jour (forcément ça me prend tout ce temps, car voyez-vous faire un daf (un papier, une page de devoir) michna et torah c'est pas simple, juste pas simple du tout; je remercie les médecins français qui sont rattachés à ma koupat holim (caisse de sécurité sociale), car sans eux être malade en Israël serait bien trop anxiogène voire redoutable pour moi; je remercie mes amis qui m'aiment et me comprennent dans cette ascension folle qu'est l'apprentissage de l'hébreu.


Toda lahem

Yom tov vé col touv






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